M. BELAAZ Mourad
RESUME
En ce qui nous concerne et dans le cadre de la Conférence Forestière Mondiale et sous le thème «Forêt, source de vie», on a voulu aborder l’une des applications de la gestion durable des forêts dans un contexte régional se résumant dans un bilan et une stratégie de préservation.
L’objectif est d’essayer d’aboutir à l’issue de cette présentation, plus ou moins générale, de cerner l’un des problèmes cruciaux, contribuant au freinage à la bonne prospérité et au bon développement de nos forêts subsahariennes représentées dans le «Barrage vert», à savoir les difficultés de régénération, donc de reproduction.
Toutes ces causes et principalement celle de la reproduction engendrent un bilan déficitaire sur deux registres, l’écologique et l’économique. Si nous ceux-là, deux effets négatifs se conjuguent: l’avancée du désert réduit les pâturages, entraînant la limitation du cheptel et les prix flambent.
Une analyse approfondie de la relation forêts des zones subsahariennes – développement durable, notamment dans ses aspects économiques et financiers; devra être et nécessairement abordée et d’une manière judicieuse et de la mettre en évidence dans l’avenir, pour nous permettre du point de vue pratique, de mieux cerner le problème par tous les moyens.
I- INTRODUCTION
Les régions géographiquement marginales en bordure des déserts et au régime climatique instable connaissent à l’heure actuelle de graves problèmes de sécheresse, induisant le milieu végétal dans d’immenses difficultés tels les problèmes de production, de régénération, des attaques parasitaires…
La répartition actuelle de vieilles pinèdes, plus particulièrement, dans la zone subsaharienne sur tous les types de substrats ne peut en effet s’expliquer que par l’existence dans le passé de conditions climatiques thermiques et/ou pluviométriques plus favorables que celles régnant actuellement. Le climat, il y a quelques siècles devait nécessairement comporter des années aux hivers plus chauds avec peut-être une pluviométrie plus importante et/ou un régime pluviométrique différent.
C’est dans le contexte de la situation écologique actuelle que s’inscrit notre intervention par:
- la définition de la nature et la quantification autant que faire se peut, les dangers de la désertification en concours avec les activités humaines sur les milieux naturels,
- La compilation des informations relatives à l’état des ressources forestières du barrage vert, en tant que moyen de lutte privilégié contre la désertification, en analysant les causes directes et indirectes de leur dégradation.
- L’établissement d’une stratégie de préservation du «Barrage vert» après avoir identifié et classé les problèmes environnementaux causant sa dégradation.
II- LE BARRAGE VERT: UN MOYEN DE LUTTE CONTRE LA DESERTIFICATION
1- Naissance de l’idée du projet «Barrage vert»:
Directement après l’indépendance, le reboisement était l’une des priorités d’urgence et ce pour le renouvellement du patrimoine forestier qui subissait un endommagement intense durant la guerre de libération.
Les travaux du projet «Barrage vert» n’était lancé qu’au début des années 70, exactement en 1974. Le projet qui relie les frontières algériennes occidentales aux frontières orientales avec une distance de 1500 Km sur une largeur moyenne de 20 Km, s’étale sur une superficie de 3 millions d’hectares.
2- Caractéristiques du «Barrage vert»:
Le «Barrage vert» se situe à la limite du plus grand désert avec une chaleur très élevée et avoisinant une chaîne montagneuse séparant le Nord du Sud.
En général, il existe deux saisons seulement dans la région: été chaud et hiver froid. Les températures hivernales varient entre 1,8 et 1,9°C, celles de l’été oscillent entre 33,1 et 37,6°C, tandis que la pluviométrie est faible à cause de sa proximité du climat semi-aride.
Tous ces facteurs climatiques influant directement sur le développement de la couverture végétale des parcours de la région en accentuant leur dégradation jusqu’à leur disparition, donnant ainsi des sols sablonneux nus.
La couverture végétale reflète par son état, les caractéristiques du climat où elle se trouve, et d’un degré moindre celles du sol.
Dans le «Barrage vert», il existe deux catégories de végétations:
- la végétation forestière: le Pin d’Alep (Pinus halepensis ), le Chêne vert (Quercus ilex), le Pistachier de l’Atlas (Pistacia atlantica), le Jujubier sauvage (Ziziphus lotus).
- La végétation pastorale: composée généralement d’Alfa dont ses feuilles sont exploitées pour la fabrication du papier.
Les caractéristiques du sol du «Barrage vert» se résument ainsi:
- profondeur faible qui ne dépasse pas parfois les 60 cm,
- quantité élevée de calcaire actif,
- quantité faible de matière organique,
- pH basique (supérieur à 7,5).
Ces caractéristiques favorisent l’érosion du sol.
Au début, le «Barrage vert» était considéré comme étant une ceinture verte contre l’avancée du désert; d’où on a mit en valeur 100 mille hectares de terre avec des micro-projets concernant les habitants de la région.
Ce projet était pris en charge par le haut commissariat au service national, qui avait installé, sur plusieurs points de ce projet, des unités de réalisation composées de jeunes militaires ayant subit une formation technique accélérée, leur permettant l’exécution du programme qui leur était confié.
En plus de cet organe et vue la grandeur du projet, il y avait aussi d’autres entreprises participantes dans sa réalisation, telle que: l’Office Nationale des Travaux Forestiers.
Tandis que les services de l’administration forestière avaient eu pour rôle la surveillance et le suivi de chaque partie du projet existante au niveau des Wilayas concernées.
Il existait en Algérie deux bureaux d’études:
- le Bureau National des Etudes Forestières,
- le Bureau National des Etudes de Développement Rural.
Ces deux bureaux avaient eu le privilège de s’occuper des études purement techniques concernant ce projet.
Dans ce contexte, il était question de recenser les terres et les forêts appartenant à la région portant ce projet.
Cette tâche était confiée à l’Institut National de la Recherche Forestière, qui avait contribué d’une façon efficace à l’édification de ce projet; puisque l’institut prédit était doté d’une station régionale spécialisée dans la lutte contre la désertification. Son expérimentation se basait sur les techniques de reboisement, le choix de plants et la fixation des dunes.
Jusqu’ici, 100 mille hectares de reboisement qui avaient été concrétisés se composent principalement de Pin d’Alep.
Le choix posé sur cette espèce s’explique par le fait que le Pin d’Alep prospère facilement dans cette région. Mais, durant ces dernières années, le reboisement avait changé d’ampleur, en utilisant des espèces variées, dans l’espoir d’acquérir plusieurs objectifs, notamment, la protection et la production de bois et de fourrage.
Le reboisement qui avait pour but primordial, la protection du sol; était réalisé sur:
- les sols à forte pente,
- les régions des dunes,
- les berges d’Oueds,
- comme brise-vent dans les régions pastorales,
- autour des villages en tant que ceinture verte.
L’objectif visé, n’était autre que le développement des parcours qui avaient subit une atroce dégradation causée par le surpâturage. Ce développement était axé sur la multiplication des capacités fourragères, par les plantations, et la limitation de la pression du pâturage en forêt, surtout dans les jeunes reboisements. Ce genre de plantation se basait principalement sur quelques espèces tout comme, l’atriplex, l’opuntia et l’acacia.
Le vent subsistant dans la région du «Barrage vert» influencent négativement sur la densité du couvert végétal; et par la fragilité des sols, provoquant ainsi la formation de dunes mobiles, qui causent à leur tour de graves incidents de dégradation sur les parcours et les terres agricoles les plus fertiles.
Le projet de fixation des dunes s’était prononcé en 1981 niveaux:
- fixation par l’utilisation de feuilles sèches de palmier,
- fixation par la plantation d’espèces conformes aux dunes de sable.
Tout cela, en instaurant la mise en défens stricte contre le pâturage et le vol.
Elle avait deux buts:
- introduction de la culture des arbres fruitiers dans les régions les plus pauvres où on avait créé des coopératives semi-collectives pour l’amélioration, dans ce domaine, de la situation sociale des habitants concernés.
- Aménagement des périmètres irrigués pour le développement de la production agricole.
Elles se composaient de:
- l’aménagement de routes et de pistes, qui avait pour but le désenclavement de la région steppique où se trouve le projet «Barrage vert»,
- la construction de retenues colinéaires et de points d’eau,
- la création de structures pour l’élevage des animaux.
3- Les premiers résultats du projet:
D’une manièregénérale, les résultats escomptés de ce projet étaient satisfaisants, puisqu’on est arrivé environ à 75% du taux de réussite; et ceci après 10 ans d’expérience.
Il faisait preuve, et jusqu’à maintenant, que la méthode combinée (fixation mécanique et fixation biologique) a démontré sa bonne réussite.
La fixation mécanique par le maillage plastique avait donné de meilleurs résultats avec un coût moins élevé, et ce pour les raisons suivantes:
- l’abondance du produit plastique dans les usines nationales,
- la facilité dans le transport sur les lieux du projet,
- une main d’_uvre limitée (un ouvrier pouvait accomplir seul 10 mètres linéaires par jour)
Ces inconvénients s’expliquaient par le fait, que le produit plastique était facilement exposé à la portée des voleurs; car sa demande était très élevée chez les riverains, et pour cela son gardiennage devait être d’une façon continue.
Tandis que, et en ce qui concerne la fixation biologique, il s’est avéré, de par l’expérience que les espèces donnant plus de réussite étaient: Tamaris articulé (Tamarix articulata) ; Retam (Retama retam) ;
Acacia: (Acacia cyanophylla) ; Atriplex : (A. semibaccata, A. nummularia et A. inflata) ; Eleagnus angustifolia ; Medicago arborea ;
III- BILAN DES TRAVAUX DE SUIVI DU PROJET «BARRAGE VERT»
1- Actions inscrites dans le cadre du développement des zones steppiques(1992-94) :
Dans le cadre du développement des zones steppiques, un dossier finalisé par un groupe de travail interministériel (Ministère de l’agriculture, Ministère de l’équipement, …) en 1992, le secteur des forêts a fait l’objet d’une formation d’axes stratégiques de développement et de la protection des patrimoines (en forêt, zone de montagne, steppe et région pré saharienne) en raison de la fragilité des milieux et de leur stade avancé de dégradation.
Ainsi, le programme de 1994 était porté sur les principales actions retenues dans le cadre du «barrage vert»: 8370 ha de reboisement, 6500 ha de travaux sylvicoles, 1400 ha de fixation de dunes, 45 000 m3 de correction torrentielle et 5000 m linéaire de brise-vent.
Ce programme était porté aussi sur la lutte contre l’érosion et la désertification notamment, après avoir recueilli les résultats de l’étude sur la désertification débouchant, essentiellement sur l’établissement d’une carte sur la sensibilité des sols à la désertification par le recours à la télédétection, il y avait eu identification d’un programme d’actions évidentes et urgentes qui consistaient en: 3710 de fixation de dunes, 1290 ha de fixation de berges, 82000 m3 de correction torrentielle, 13350 ha de mise en place d’ouvrages de conservation du sol et 1500 ha de régénération d’Alfa.
2- Actions à promouvoir en zones steppiques dans le cadre de développement du «barrage vert» (1994-99):
Selon l’ANF (Agence Nationale des Forêts) et à partir de la fin de l’année 1994, un programme forestier ambitieux et étalé sur une période de 5 années; est quant à lui destiné aux régions steppiques, au niveau des premières rides de l’Atlas saharien. Il vise la consolidation des premières actions du «barrage vert» dont il convient de rappeler le caractère pionnier de cet _uvre gigantesque de protection contre l’avancée du désert. L’aspect du «barrage vert» en matière de lutte contre la désertification n’est plus à démontrer, sinon pour dire qu’il doit être ambitieux, persévérant et performant.
Au fait, son extension à l’intérieur des zones protégées, englobant tout aussi bien des actions de reboisement, de mise en valeur pastorale et de désenclavement portant sur la consolidation sur 27 000 ha, la plantation forestière nouvelle 65 000, la plantation fourragère 7900 ha, l’ouverture de pistes nouvelles 1215 Km et l’aménagement de pistes 2220 Km. Cette démarche revêt un caractère social et des exigences techniques.
Ainsi, au plan social, l’impératif visé, est le plein emploi en zone rurale, l’amélioration des revenus des populations riveraines forestières et des zones montagneuses.
IV- STRATEGIE DE PRESERVATION DES RESSOURCES FORESTIERES DANS LES ZONES SEMI-ARIDES
1- Lancement d’un programme de développement:
Le lancement d’un programme concernant la connaissance, la réhabilitation et le développement des ressources forestières dans les zones semi-arides, notamment celles du «barrage vert», paraît plus nécessaire que jamais.
Les points du programme initié comprendront:
- l’analyse et le diagnostic de la situation actuelle en matière de ressources forestières et d’équilibres naturels (par exemple, la régénération naturelle du Pin d’Alep dans le «barrage vert»,
- l’organisation à mettre en place et les moyens à mettre en _uvre pour arriver à prendre en charge des actions liées à la restauration des équilibres et faciliter à l’utilisation durable des ressources forestières dans des projets agricoles, forestiers et pastoraux notamment.
2- Nécessité de la conservation des richesses naturelles:
La protection des richesses naturelles existantes constitue une nécessité impérieuse, il est donc de notre devoir de l’assurer dans l’intérêt des générations actuelles et futures. Nos descendants sauront certainement tirer un bien parti de nombreuses espèces considérées à l’heure actuelle comme inutiles.
Les raisons scientifiques sont primordiales et justifient, plus encore que le caractère esthétique et/ou pittoresque d’un territoire, sa protection. Ces raisons sont d’ordre écologique, génétique, agronomique et scientifique.
3- Maintien des équilibres écologiques:
De par sa position biogéographique et les caractéristiques de son climat, l’Algérie présente une très grande diversité de biotopes et de communautés naturelles (milieux humides, zones côtières, zones montagneuses, steppes, désert,…). Au moment où l’homme entreprend de grands aménagements, il est absolument indispensable de conserver des écosystèmes qui serviront de témoin pour l’étude de la dynamique écologique.
4- La régénération naturelle: un moyen de préservation des forêts:
Les forêts algériennes entre autre celles du «barrage vert», sont dans un état de vieillissement avancé (environ 60% de la surface) avec une régénération préexistante pratiquement nulle. Aucune solution n’est encore mise au point pour renouveler ces forêts dans le vieillissement est mis en évidence depuis 25 ans.
Un inventaire forestier national, réalisé entre 1978 et 1984 sur l’ensemble du territoire Nord, a servi de base à l’élaboration d’un plan national de développement forestier à long terme. Ce plan définit les objectifs généraux d’affectation des terres:
- prévoit les objectifs en matière d’études et des travaux d’aménagement des forêts,
- propose des règles de gestion à appliquer dans les différents types de peuplements.
Mais cela ne suffira pas pour ce qui de l’aspect purement technique, il faut aussi relever le tracé territorial permettant de mieux circonscrire et de mieux appréhender les interventions multiformes.
La loi forestière du 23 juin 1984 assujetti la gestion forestière à des plans d’aménagement approuvés par le Ministre.
Les premières études d’aménagement ont été réalisées à partir de 1972. La priorité a été donnée aux forêts de Pin d’Alep pour l’approvisionnement des industries de bois.
L’application des plans d’aménagement comporte: les infrastructures, les coupes, les plantations et les régénérations.
Les difficultés de régénération des essences naturelles et les problèmes pastoraux constituent deux importantes contraintes dans l’application des aménagements.
Pour terminer, on peut dire que les risques élevés de gestion forestière sont dus principalement à la pression sociale et à la difficulté de régénérer les forêts.
V- CONCLUSION
Ces actions que nous entreprendrons ces prochaines années seront déterminantes, ou nous irons tout droit, vers le chaos, par la surexploitation et l’abus de nos ressources biologiques, ou nous choisirons la voie de la raison, celle du maintien de la diversité et de l’utilisation durable des ressources. C’est la prospérité de la société humaine qui est en jeu.
Cependant, le développement croissant des activités socio-économiques des populations humaines s’est souvent fait au détriment des milieux naturels, ces populations les plus déshéritées des revenus meilleurs, les plus démunies vivant généralement dans les zones forestières et à vocation forestière et dans la steppe, il est légitime que ces zones fassent l’objet d’une attention plus grande.
Néanmoins, ces zones forestières constituent à l’échelle des régions et du pays un capital qu’il convient de protéger en le préservant des dégradations naturelles, humaines et animales d’une part et, de le valoriser aux mieux d’autre part, en améliorant quantitativement son rendement économique.
Comme on a dit autrefois «En jouant la carte verte allons-nous sauvegarder notre patrimoine durable et créateur de richesse?»
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES:
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Boureguia S.,1993. La désertification et le système écologique équilibré. Hebdomadaire «Le Rif» du mois de juin 1993.
Kadik B.,1993. Une nécessité pour un développement harmonieux.
Environnement: conservation et promotion de la nature. Hebdomadaire «agro-industriel» du mois d’avril 1993.
Source
https://www.fao.org