L’éclairage est trop souvent vu uniquement sous l’angle financier, ou écologique, en lien avec les économies d’énergie. On oublie que la lumière est essentielle à notre bien-être et à notre santé. Le Lighting Design, ou l’Art de la conception de l’éclairage intérieur, apporte une réflexion globale pour répondre à une question simple : comment bien éclairer une pièce ?
Le paradoxe du lighting design : essentiel et pourtant méconnu
Quand on parle de Lighting Design, on imagine souvent un lieu bénéficiant d’une lumière très étudiée, comme une expérience visuelle qui se suffirait à elle-même. Il est vrai que les premiers lighting designers ont souvent travaillé au départ sur des lieux scénographiés, nécessitant une lumière sophistiquée : musées, bars, restaurants chics…
De la même manière, dans l’éclairage architectural ou décoratif, on s’intéresse souvent plus à l’objet lumineux qu’à la lumière elle-même. Et on peut se retrouver à positionner les luminaires sur les plans d’implantation électrique d’une pièce, avant même d’avoir songé à la conception de l’éclairage.
Pourtant l’éclairage n’est pas un luxe, mais un besoin fondamental. La lumière artificielle doit être le prolongement logique de la lumière naturelle.
Les pays nordiques l’ont compris avant nous latins : ils ont appris à jouer avec la lumière dans les intérieurs pour se sentir bien toute l’année, et quelle que soit l’heure du jour ou de la nuit.
En effet, l’impact physiologique de la lumière sur le bien-être via les rythmes du corps humain est désormais prouvé. Nos comportements sont intimement liés à la position du soleil dans le ciel, par exemple :
• le soir, on a besoin d’éclairages bas, qui nous apaisent,
• de la même manière, les enfants, qui ont des réactions à la lumière plus primaires que les adultes, sont les premiers à faire les frais d’un éclairage inadapté, en manifestant excitation et nervosité.
L’éclairage est donc une réflexion qu’il faut mener en priorité pour le lieu où nous passons le plus de temps : la maison.
Pour ce faire, le lighting designer va s’intéresser successivement à trois aspects :
• l’ambiance lumineuse recherchée,
• la conception de l’éclairage adapté à cette ambiance,
• le choix des luminaires proprement dits.
Nous allons donc maintenant évoquer ces trois étapes plus en détail.
Choisir une ambiance lumineuse, la première étape d’une bonne conception de l’éclairage
Loin d’être futile, l’étape qui consiste à définir l’ambiance lumineuse est primordiale.
D’abord, car l’éclairage idéal d’une pièce dépend de sa fonction, ou plutôt de ses fonctions, selon le moment où on s’y trouve.
C’est pourquoi la première question à se poser sera : “A quoi cette lumière va-t elle servir ?”.
Prenons une cuisine ouverte, par exemple. Quand on prépare un repas, on a besoin d’une lumière intense et dynamique, pour bien voir les aliments et suivre l’état de la cuisson.
Pourtant, une fois la cuisson terminée, et lorsque l’on passe à table, on va chercher à se détendre. Donc, toujours dans le même espace, on aura besoin d’une lumière plus douce pour manger dans une ambiance chaleureuse et décontractée.
De même, pour un couloir. En journée, une lumière vive permettra de voir clair au fond du placard, et le soir, en rentrant tard, on sera plus enclins à utiliser la veilleuse.
Dans une salle de bains, on équipera le tour du miroir de lumières vives pour pouvoir se raser ou se maquiller. Mais pour prendre un bain au calme, on privilégiera une lumière plus douce.
La lumière a aussi sont importance dans les établissement recevant du public (ERP).
En effet, la lumière aura aussi une fonction sécuritaire. Par exemple :
• éclairer la signalétique dans un magasin,
• suggérer une logique de circulation dans un musée,
• bien voir les marches ou les obstacles éventuels, dans les escaliers d’un hôtel.
L’ambiance lumineuse pourra également tirer parti de l’architecture de la pièce, ou de sa décoration. L’éclairage, c’est l’âme vivante du décor.
Par ailleurs, on voudra peut-être mettre en avant un détail bien précis, en l’éclairant de façon particulière : ce peut être une moulure, un tableau… Inversement, il faudra penser à éviter certains éléments, comme par exemple un miroir : il pourrait refléter un éclairage de façon trop blafarde, si l’on n’y prend pas garde.
A la manière d’un lighting designer dans un musée, on pourra éclairer une oeuvre, jouer avec ses reliefs, les montrer ou les cacher. Un faisceau lumineux peut alors devenir un décor à soi seul, donnant un effet graphique, très design.
D’ailleurs, les éclairages peuvent servir à corriger les défauts d’une pièce.
Prenons un long corridor. Si l’on n’y prend pas garde, il peut offrir une perspective formant un”tunnel”, qui aura un effet des plus sinistres. Des appliques ou des spots intelligemment placés pourront contribuer à créer des ruptures, et mettre en valeur des objets de décoration.
Autre exemple, éclairer un plafond ouvre des perspectives, donne du dynamisme. On pourra alors soit cacher un coin disgracieux, soit montrer un angle digne d’intérêt.
L’ambiance lumineuse devra aussi tenir compte de la personnalité des habitants, et surtout de leur sensibilité à la lumière.
En effet, on sait que les températures de couleur jouent sur la personnalité.
Certaines personnes préféreront les éclairages chauds, quand d’autres se sentiront mieux avec des teintes froides.
De même, il est des gens qui souhaitent une lumière forte pour se réveiller, quand d’autres ont besoin de plus de douceur.
Enfin, on pourra aussi jouer à créerune ambiance, soit traditionnelle, soit plus décalée. Par exemple, un chalet ne sera pas forcément à éclairer avec des couleurs chaudes. Une ambiance très contemporaine sera mieux servie par l’effet de surprise créé par un éclairage plus blanc.
La conception de l’éclairage, ou comment interpréter l’ambiance lumineuse choisie
La conception est l’étape de traduction technique pour obtenir la lumière recherchée :
• comment il faut éclairer,
• depuis où,
• et avec quoi.
On va donc s’intéresser maintenant à la source lumineuse proprement dite. La source lumineuse, c’est l’objet qui produira la lumière, et le type de lumière qu’il produit.
On commencera par choisir le nombre de sources nécessaires, et le lieu où elles seront placées.
Il faudra déterminer les sources lumineuses qui seront visibles ou non visibles dans la pièce étudiée.
En effet, on pourra jouer avec les sources, pour que certaines, visibles, produisent un effet décoratif, tel un objet lumineux. D’autres a contrario, seront totalement cachées.
Le lighting designer devra également déterminer l’angle d’incidence de chaque source lumineuse. Prenons par exemple des spots. Un spot positionné avec un angle d’incidence de 10° produira un effet lumineux direct et puissant sur la surface éclairée. A contrario, un spot axé à 120° dégagera un effet lumineux plus large et plus diffus.
Ensuite, pour choisir le type de lumière proprement dite, il faudra s’intéresser aux caractéristiques des ampoules.
Les ampoules sont classées selon trois ou quatre critères principaux :
• le flux lumineux,
• la température de couleurs,
• l’indice de rendu des couleurs,
• et pour les spots, l’angle d’incidence.
Le flux lumineux, exprimé en Lumens, permet de se faire une idée de la puissance d’éclairage de l’ampoule, aussi appelée intensité lumineuse.
En général, les ampoules offrent des intensités lumineuses allant de 300 à plus de 1 000 lumens, pour le secteur résidentiel.
Le lighting designer choisira le nombre de lumens idéal, en fonction de 3 éléments :
• la surface totale à éclairer,
• la distance entre la source et la cible,
• et l’ambiance lumineuse choisie, selon qu’elle sera forte ou plus douce.
La température de couleur, quant à elle, permet d’exprimer une perception de la couleur de la lumière.
Ainsi, on constate que certaines lumières sont jaune orangé, quand d’autres sont plus blanches, presque bleues. Pour donner quelques exemples :
• sont considérées comme “chaudes” les lumières émises par un coucher de soleil, une bougie, un feu.
• sont considérées comme “blanches”, voire “froides”, les lumières émises par le soleil au zénith, la pleine lune.
La température de couleur, est exprimé en kelvins, et peut être classée comme suit :
• en dessous de 3300 kelvins, on considère qu’une ampoule va émettre une lumière chaude,
• entre 3300 et 5000 kelvins, la lumière est dite neutre,
• et au dessus de 5000 kelvins, il s’agira d’une lumière bleutée.
Chaque type de couleur a ses avantages et ses inconvénients.
Une lumière chaude sera confortable pour les yeux, et chaleureuse en sensations. Mais elle aura ses limites si on a besoin de lire, ou d’effectuer des gestes très précis. En effet, elle n’offre pas beaucoup de contrastes.
A l’inverse, une lumière très blanche permet de travailler car elle offre de la précision. Mais elle est déconseillée le soir car elle excite le système nerveux.
L’idéal sera de disposer des deux types de lumière pour recréer le rythme circadien, ou rythme d’alternance du jour et de la nuit, comme en luminothérapie :
• des lumières très blanches pour bien se réveiller le matin,
• des lumières plus neutres dans la journée, pour travailler et rester dynamique,
• des lumières jaunes le soir, pour se détendre progressivement.
Pour cela, le lighting designer dispose de solutions d’automatisation, à base de variateurs et programmateurs, grâce à la domotique.
Enfin, l’indice de rendu des couleurs, IRC ou CRI (Color Rendering Index) permet de se faire une idée de la capacité de l’ampoule à traduire les couleurs de façon précise. Cet indice sera d’autant plus important que l’architecte d’intérieur aura élaboré un travail détaillé sur les choix des couleurs dans la pièce.
L’indice CRI est fonction de la qualité du spectre lumineux émis par l’ampoule.
L’indice varie dans l’absolu entre 0 et 100. Les ampoules vendues dans le commerce ont souvent un IRC compris entre 85et 95 : il est conseillé d’utiliser l’IRC le meilleur possible, qui donnera une transcription plus naturelle des couleurs.
Une dernière chose concernant la conception de l’éclairage après avoir choisi le flux lumineux, la température de couleurs, et l’indice de rendu des couleurs : en cas d’utilisation de LEDs, de plus en plus répandues aujourd’hui, le lighting designer veillera à les choisir chez un fournisseur compétent. En effet, le passage en courant continu induit par la LED peut entrainer des problèmes de scintillement si ses composants sont de mauvaise qualité.
Un bon choix de luminaires se fait à partir du type de lumière recherché
On oppose trop souvent éclairage architectural et éclairage décoratif. La lampe doit être décorative si elle est visible, mais avant tout elle doit servir l’ambiance lumineuse choisie.
Une fois la conception de l’éclairage réalisée, on dispose de critères très précis pour choisir les luminaires. C’est bien de ces critères qu’il faut partir pour choisir les luminaires, et non du design des luminaires.
Ici commence un travail fastidieux où il va falloir vérifier que chaque luminaire dispose des caractéristiques recherchées, au delà de son aspect esthétique.
Heureusement, le lighting designer connait bien les fournisseurs et les gammes de luminaires, et saura rapidement vers lesquels s’orienter.
Cela ne l’empêchera donc pas, au besoin, de choisir un luminaire design voire spectaculaire, qui saura servir l’ambiance lumineuse.
Une fois les luminaires sélectionnés, rien ne remplace la phase de test, car le lighting design n’est pas une science exacte. A fortiori, les tests les plus importants seront à réaliser une fois la nuit tombée, pour connaitre le rendu exact du projet.
Dans cet étape, l’électricien est un allié indispensable du lighting designer : un bon travail mené en tandem apportera beaucoup d’efficacité, tant du point de vu du rendu lumineux que de l’automatisation, voire de la domotisation.
Enfin, en cas d’éclairage extérieur, des critères supplémentaires, tels que l’étanchéité et la résistance, seront à prendre en compte dans le choix des luminaires. Et le lighting designer pourra alors, dans ce cas, travailler en équipe avec le paysagiste.
Source
https://www.arch-and-home.fr/architecte-et-maison-conseils/le-lighting-design-pour-une-bonne-conception-de-l-eclairage-interieur.html